lundi 4 juin 2012

À Ottawa, la Terre est plate (2)


Retour sur mon message de vendredi dernier, à propos du projet de loi C-38, qui devrait être adopté avant les vacances estivales de nos représentants dans la capitale fédérale.

De ce projet de loi omnibus si énorme à en devenir grotesque, je vais me limiter à quelques modifications - ou abolitions - des lois actuelles, qui auront tôt ou tard un impact notable sur les plaisirs de la table.

  • Loi canadienne sur la protection de l'environnement – la limite d’un an imposée à l’heure actuelle aux permis accordés pour l’immersion en mer de déchets et autres matières pourra dorénavant être renouvelée quatre fois. Les limites de trois et cinq ans destinées à protéger les espèces en péril des préjudices causés par l’industrie seront éliminées.

Entendez-vous ? C'est le cri d'un camion qui recule. Pis vite. De quelques décennies en quelques semaines. On recule au bon temps où on pouvait s'en foutre des conséquences. Où la science et la recherche en environnement, c'était juste les granos, les naturistes pis les hippies qui faisaient ça dans leurs temps libres - tout en chantant du Paul Piché ou du Bob Dylan, autour d'un feu, sur le bord d'un lac. Le joint circulait pis ça divaguait : 

- Les poissons man, penses-y tsé, en manger va peut-être nous rendre malades à cause de la pollution pis des déchets dans l'eau...
- Malade man...   



  • Loi sur les pêches – les dispositions portant sur l’habitat des poissons seront modifiées de manière à protéger uniquement les poissons « importants pour le commerce, les Autochtones ou la pêche récréative », quoique même ces habitats seront moins bien protégés qu’avant. En effet, l'incitatif créé par ces nouvelles dispositions risque d'entraîner le drainage d’un lac et la mort subséquente de toutes les espèces de poissons qui l’habitent, à défaut d’être une pêcherie, pour créer un puits sec et le remplir de résidus miniers.
Celle-là, avouons-le, Monsieur Plan Nord - qui n'est pas ami facebook avec Monsieur Jambon - va l'aimer pas mal. 

Voilà l'État qui abdique. Les intérêts privés triomphent. Suffit maintenant de congédier des scientifiques et des inspecteurs - ou de les filer aux entreprises intéressées - et les voies deviendront toutes pénétrables.

Oups...C'est exactement ce que fait aussi l'État en ce moment !
  •  Loi sur la protection des eaux navigables – les pipelines et les lignes électriques seront exemptés des dispositions de cette loi. En outre, l’Office national de l’énergie absorbera la Loi sur la protection des eaux navigables chaque fois qu’un pipeline traversera des eaux navigables. Enfin, la Loi sera modifiée pour dire qu’un pipeline ne constitue pas un « ouvrage » au sens de cette loi.
C'était donc pour ça. Les pipelines. Ceux qui croyaient Line avait prit sa retraite seront confondus !

Le Canada, super-puissance énergétique. Le pétrole unifolié va se répandre partout sur le globe. 

Des Amérindiens viennent de retrouver des poissons difformes tout près de sables bitumineux. Ils veulent entrer en contact avec un chercheur pour déterminer s'il y a un lien de cause à effet.

Désolé, celui que vous cherchez, on l'a viré !
  • Loi sur les semences du Canada – cette loi sera entièrement remaniée de manière à transférer l’inspection des cultures des inspecteurs de l’Agence canadienne d’inspection des aliments à des « fournisseurs de services autorisés » du secteur privé.
 
Un ami me racontait que, travaillant pour une compagnie d'inspection en environnement, alors qu'il effectuait des tests - qui échouaient les uns après les autres- sur la cime d'une cheminée d'une usine, il avait dû tester jusqu'à ce que ce soit conforme avec les normes - des dizaines de fois. L'usine payait les heures supplémentaires et l'entreprise d'inspection avait fait son boulot.

Mais ce genre d'histoires ne peut certainement pas arriver en alimentation, non ?

Restons tout de même à l'affut, citoyens !