samedi 4 février 2012
J’ai vendu des cochonneries – mea culpa !
Pendant un petit peu plus d’un an, j’ai été caissier dans un dépanneur – un as véritable, un sourire dans le bas de l’échelle – clin d’œil à toi, mon cher Miller.
Ma mission se termine dans les prochaines heures. L’agent secret - au nom de code Gros Jambon – a analysé – au bas mot - les us et coutumes de son quartier, les habitudes de ses consommateurs ; certaines personnes sont devenus des personnages, d’autres ne faisaient que passer mais en disaient beaucoup.
Ce qui suit ne sont donc que des observations bien personnelles qui, bien sûr ne valent pas les grandes lignes des études de nos chercheurs.
Ce ne sont que des constats sur le terrain, sur le plancher des vaches – où la vie palpite, grouille, en ne demandant que son change et trop souvent un sac en plastique pour transporter le moindre achat.
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J’ai ma petite idée sur le succès des boissons énergisantes. Beaucoup de travailleurs sont passés devant moi et je pouvais parier sur ce qu’ils allaient manger pour souper. Avec les deux grosses canettes – deux parce que les compagnies font des offres, consommer plus pour moins de frics, on se fiche bien de vos abus – se retrouvaient des sandwichs ou des sous-marins hors de prix. Vous les connaissez, ça se vend entre cinq et six dollars, il n’y pratiquement rien là-dedans. Et malgré le sac de chips ou le petit gâteau qui accompagnaient le tout, on peut comprendre que ça ne représente pas du tout un repas digne de ce nom – qu’importe le travail et d’autant plus s’il demande un effort physique.
D’où là le manque et le besoin d’énergie.
Ce qu’on peut se faire avoir, quand on ne prend pas le temps de se faire un lunch à la maison.
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Il y avait ce bonhomme qui venait chaque jour chercher sa loterie et ses résultats de la veille.
Une fois, je l’entends me dire, tout près des frigidaires : « As-tu déjà goûté à ça ? »
Perdu dans mes pensées ou le nez dans le journal, je lève la tête, ne sachant pas trop à quoi m’attendre.
Il brandissait les deux cheeseburgers emballés sous vide – s’avez juste à les réchauffer puis à les avaler.
Il dit : « Tu ouvres un peu l’emballage pis tu les mets dans le micro-onde. C’est vraiment bon. » Et d’ajouter son petit coup de langue sur les rebords de ses lèvres, le même qu’il faisait lorsqu’une jolie cliente quittait la place.
Quoi répondre, tout en gardant une moue de dégoût pour soi ?
« Les résultats que tu voulais, c’était ceux de la Quotidienne à quatre chiffres ? »
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Cette cliente-là, je ne vous dis pas ce qu’elle fait dans la vie pour payer son café. Mais je peux vous révéler ce qu’elle met dedans : pas un, pas deux, mais bel et bien dix sachets de sucre.
« Tu veux goûter ? », qu’elle m’a dit.
« Tu veux me tuer ? », j’ai répondu.
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Pas plus tard que cette semaine, j’ai formé un nouveau. Je me promenais avec lui dans le back-store en lui montrant où étaient disposées nos réserves.
« Vous avez de la Pabst. Vous devez en vendre beaucoup », qu’il me dit.
« Ouais », je réponds.
« Vous avez aussi de la Old Milwaukee. C’est ma bière préférée », qu’il ajoute.
Franchement, content de ne pas avoir eu à le côtoyer, celui-là.
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Bref, j’ai vendu des cochonneries – mea culpa !
(Demain : Bières et Jambon, la suite.)