vendredi 20 janvier 2012

Comment décimer un village – sur notre bras !


D’une main, la droite conservatrice et/ou les grandes gueules libertariennes  - en pantoufles - vous répèteront que l’État ne doit pas nous dire quoi manger. De l’autre, dans les faits, ce laisser-faire nous a mené tout droit à l’industrialisation alimentaire à outrance.

Et allez-vous les entendre rouspéter contre les subventions massives de l’État concentrées en majeure partie dans les poches des gros producteurs ? Pas souvent.

Un paradoxe qui décime un village après l’autre. Comme dans ce cas-ci, en Montérégie.

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Ça se passe à Saint-Marcel-de-Richelieu, une minuscule bourgade de 550 âmes – elle était peuplée de 630 personnes il y a cinq ans – faites le calcul en pourcentage par rapport à une grosse ville et vous avez là une fichue belle saignée.

Autrefois « capitale du concombre » - vous souriez, moi aussi, mais c’est bon, des concombres – on n’y fait plus aujourd’hui  la culture de ce légume. Par contre, selon les dires du maire, Yvon Pesant, on y trouve des cornichons de l’Inde à l’épicerie.

Pourtant, le territoire de la municipalité est zoné agricole à 99,4%. Des terres parmi les plus riches au Québec. Que retrouve-t-on dans ces champs de nos jours ? De grandes cultures de maïs-grain, OGM à 80 %. Exit la production maraîchère – vive la production de masse, où la moitié des terres cultivées est possédée par quatre grands producteurs. Ah, j’oubliais, il y a aussi des porcheries.

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Et les responsables de ce gâchis de haut potentiel arable ? Nous, consommateurs, par le biais de l’État et des programmes d’assurance de la Financière agricole.

Car c’est comme ça que ça fonctionne. Parce que le pain de nos impôts subventionne les gros joueurs – que les miettes pour les petits entrepreneurs, pour les initiatives audacieuses et innovatrices.

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L’État a un rôle à jouer dans la répartition de la richesse et des chances. Mais dans la situation actuelle qui perdure depuis autant d’années que de dommages, il penche toujours – ou presque – du même côté, celui des poches déjà pleines qui ne cessent de le courtiser, ces « poches » - ou ces « moches » - qui s’inviteront chez vous à souper, et qui vous suggéreront ensuite, au digestif, pour qui voter.

Il y en a qui ont intérêt à ce que rien ne change.

Mais, de par nos choix, nos responsabilités et nos libertés, nous avons un pouvoir inouï à redécouvrir et à saisir.

Source : Le Soleil, mercredi 18 janvier 2012